C’est devenu une tarte à la crème que de dire que l’école reproduit les inégalités sociales, et que l’ascenseur est en panne.
Les articles de Gaechter ont fait remonter de ma mémoire quelques articles (voir ici) dont celui-ci, paru sur le site Observatoire des Inégalités, qui donne indéniablement à réfléchir, et qui me semble-t-il valait bien un petit écho :
Inégalités sociales face à l’orientation : le rôle de l’école.
L’introduction, battant en brèche l’idée selon laquelle cette inégalité serait exclusivement liée à la réussite scolaire, est d’autant plus socialement et sociétalement inquiétante :
Les inégalités d’orientation à l’école pèsent autant que les inégalités de réussite. Et pourtant, les élèves devraient connaître des destinées scolaires correspondant à leur niveau… Le point de vue de Marie Duru-Bellat, sociologue, professeur à Sciences-Po.
Ce qui signifie qu’à niveau équivalent les élèves n’ont pas les mêmes chances en fonction de leur origine sociale !
Marie Duru-Bellat enfonce le clou :
les recherches européennes montrent depuis 30 ans que dans les inégalités sociales de carrières scolaires, les inégalités de choix et d’orientation pèsent autant que les inégalités de réussite.
Elle décrit ensuite les mécanismes sous-jacents à l’orientation :
1) des inégalités sociales de réussite qui très tôt vont fermer certains choix
2) des phénomènes d’auto-sélection plus ou moins stricte selon les milieux sociaux : même quand ils ont le même niveau de réussite, les enfants d’ouvriers visent moins haut que les enfants de cadres
3) une certaine passivité de l’institution : les conseils de classe s’efforcent de donner satisfaction aux familles et ne se risquent que très rarement à suggérer aux familles (de milieu populaire) qui se sont très (trop) fortement auto-sélectionnées qu’elles pourraient viser plus haut, de telle sorte qu’ils entérinent ainsi les inégalités sociales inscrites dans les demandes
4) un impact de l’ « offre » scolaire, souvent méconnu, et d’autant plus important que les ressources familiales sont limitées : dans ce cas, on « choisira » plus souvent la filière technique ou universitaire qui minimise les déplacements ; on sera donc d’autant plus dépendant d’une « offre » qui souvent accentue les inégalités de « destin scolaire »
Elle souligne par ailleurs qu’une orientation plus juste serait une orientation fonctionnant moins sur le mode du couperet.
En insistant sur le fait que donner du poids aux familles dans les décisions d’orientation apparaît comme un mode de fonctionnement démocratique, mais de fait cela entérine des inégalités sociales d’information, et que démocratiser l’information est donc un préalable indispensable.
Elle remarque qu’un des seuls pays où les inégalités de carrières scolaires ont sensiblement diminué ces dernières décennies est la Suède où, plus que des réformes éducatives, ce sont des réformes sociales allant dans le sens d’une réduction des inégalités entre les familles qui semblent avoir été le levier déterminant.
Et de poursuivre : Des familles moins inégales, mais aussi des positions sociales elles-mêmes moins inégales, en concluant : une orientation moins inégalitaire n’est donc qu’une facette parmi les multiples voies possibles pour rendre l’école – et en arrière-plan la société – moins inégalitaires.
Une manière de dire que tout se tient !!!
à lire aussi : Peut on diminuer les inégalités sociales à l’école ?
Tags: discrimination - exclusion, éducation, enfance, générations, jeunesse, services publics, Société, inégalités, réforme