Judiciarisation, responsabilisation, financiarisation… civilisation ?

Ces mots en « tion » évoquent le mouvement, le changement, le processus, le « aller vers »… la trans-form-ation.
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Une évolution inéluctable, voire inexorable et écrasante, ou le choix est-il encore possible d’une « autre » civilisation ?

Différents faits, divers ou de société, ces derniers temps, incitent en tout cas à un questionnement.
Auquel les réponses apportées sont essentielles et fondamentales pour déterminer la « couleur » de la société dans laquelle nous allons vivre.

Quelques réflexions, sur ces mots choisis arbitrairement, et qui en appellent bien sûr bien d’autres !

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Judiciarisation :

¤ Un professeur se retrouve traduit en correctionnelle pour avoir giflé un élève (voir parmi bien d’autres L’élève giflé par le professeur exclu).
Je ne défends en aucun cas ce geste. Etait-il bien utile pour autant que son auteur se rende devant un juge pour régler le problème ? Une sanction administrative (donc de sa hiérarchie à l’Education Nationale) n’aurait-elle pas suffi ?
Il est vrai que le père de l’élève est gendarme, et a aussitôt porté plainte…
Mais cet incident intervient alors même que le gouvernement (Dati et Darkos) envisagent -je fais court- de judiciariser les incivilités scolaires (Les élèves chez le juge? Les experts de Rue89 sceptiques)…
La vie à l’école ne pourrait donc être régulée que par la Justice, la pénalisation, la dénonciation, la juridiciasition ?
Ca promet !

¤ Un chercheur de l’INSERM est poursuivi pour diffamation… ce qui ne peut qu’être interprété comme une atteinte à la liberté d’expression et de recherche (voir Lanceurs d’alerte scientifique).
Je ne parle même pas des péripéties judiciaires qui touchent les medias, à plus ou moins bon escient… mais il est certain qu’au moins les avocats sont contents !

¤ Mais c’est toute la société, et dans tous les domaines, qui est ainsi judiciarisée.
Avec le Droit au Logement Opposable (ça vous fait une belle jambe, quand de toutes façons il n’y a pas de logements disponibles !), ou le droit absolu de faire scolariser un enfant handicapé, alors que les moyens ne suivent pas, et que cela génère des situations de détresse difficilement surmontables pour les enfants, leurs parents, et leurs enseignants ! (voir Un droit de scolarisation « opposable » pour les handicapés).
A quand le droit opposable à l’emploi ? Inscrit lui aussi dans la constitution…

¤ Idem pour les OGM, avec cette idée tout de même géniale de permettre leur culture, mais de donner la possibilité concomittammant aux éventuels « contaminés, « pollués », « OGMisés » de demander des dommages et intérêts…

¤ Ce qui pose problème dans cette judiciarisation, c’est qu’elle ne règle rien sur le fond, et creuse les inégalités.
En effet: elle tend à dédouaner les politiques publiques de leurs responsabilités, en mettant en avant l’étendard du « recours possible »… lequel est loin d’être accessible à tous (voir Accès au droit et à la justice – inégalités ?), et où l’issue demeure en tout état de cause incertaine !

¤ L’autre problème étant que le « mouvement » actuel va vers une répression de plus en plus forte et aveugle (peines plancher, rétention de sûreté…) sans se préoccuper des causes… et trop peu des conséquences de cette « criminalisation » qui risque de faire exploser les prisons ! Et donc la société toute entière.
(voir Rétention de Sûreté – le Sénat s’oppose à Dati et Contre la rétention de sûreté – appel… alors qu’il semble bien que la loi ait été adoptée par le Sénat, avec quelques amendements…)

Ne serait-il pas plus sain et rentable (puisque cela devient l’argument ultime) de préserver les droits de tous et de chacun, avant de les inviter à en appeler à la Justice, déjà bien débordée ?

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Responsabilisation :

Une responsabilisation qui a tendance à rimer avec culpabilisation, ce qui n’est tout de même pas la même chose !

¤ responsabilisation des malades, via les franchises médicales : parce que seuls les malades mettent en cause les équilibres précaires de la Sécurité Sociale, en oubliant au passage la règle d’or du « chacun cotise selon ses moyens et reçoit selon ses besoins ! ».

¤ responsabilisation vis-à-vis des résultats, qui rime avec évaluation, des ministres, des profs, des toubibs, des employés de l’ANPE/UNEDIC, des fonctionnaires en général et des politiques publiques en particuler… et tous ceux que j’oublie !
En oubliant que l’ »obligation de moyens » n’est pas forcément une « obligation de résultats ».
Parce qu’il est des domaines où les 2 ne vont pas forcément de pair, du moins à court terme, ce qui ne rend pas l’action moins nécessaire en elle-même.
Et qu’il serait sans doute intéressant de procéder à des « évaluations positives » (vous savez, un peu comme la discrimination pareillement qualifiée) et donc dynamiques, au lieu de porter seulement la sanction, et la diminution des moyens.

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Financiarisation :

La globalisation ne va pas sans elle. Une globalisation inéluctable, et dont les conséquences sont présentées comme telles !

Lesquelles conséquences se nomment délocalisation, suppressions d’emploi, baisse du pouvoir d’achat, augmentation des rémunérations du capital, course au profit, précarité, spéculation…

¤ L’exemple de la Société Générale est exemplaire (!) à cet égard: 2 milliards de perte, sans compter les 5 milliards engendrés par le seul Jérôme Kerviel (ben voyons !), qui n’a fait que pousser la logique à son terme !

¤ Une financiarisation qui pousse non pas à financer, mais à s’endetter pour faire tourner l’économie…
Le résultat est énorme aux Etats-Unis… mais sera sans doute sensible en France, contrairement aux propos de Christine Lagarde.

¤ Une financiarisation déconnectée du réel, de la réalité de l’économie, mais où les gains peuvent se révéler énormes, sans que personne n’y trouve à redire. Des gains qu’empochent les spéculateurs, sans coup férir.
Où les pertes peuvent aussi se révéler abyssales, sans que personne soit capable de dire où se trouvent les gouffres… mais où tout un chacun va payer les dégâts !
Je ne retrouve ni la phrase exacte, ni l’auteur, mais grosso modo, un univers où les profits reviennent aux « financeurs », et où les pertes sont mutualisées.

La création de richesse créatrice de richesse ? Pas sûr !
La perte de richesse génératrice de pauvreté ? C’est sûr !
Sûr aussi que la création de richesses pour certains signe la création de pauvreté des autres à l’échelle mondiale.

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Civilisation :

Le sujet de la civilisation devient du coup épineux…
Et il s’agirait d’abord de s’entendre sur les termes !
Mais si celle qui nous est promise est celle du toujours « plus de profit », « plus de répression », « plus de culpabilisation »… ou en miroir « moins de répartition », « moins de prévention », « moins de solidarité », on peut se demander s’il s’agit encore d’une action civilisatrice !

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Edité le 17/02/2008 :
J’ai oublié le 4ème pilier de ce monument, qui serait l’évaluation
Qui comporte aussi quelques travers et risques, sous ses dehors d’objectivité.
Or celle-ci risque fort de se retrouver au centre de la RGPP, et de l’action des ministères.

Beaucoup, beaucoup trop d’articles et réactions ici ou là…
Morceaux choisis (en vrac):
- Classe tous risques !
- De la taloche comme méthode éducative
- Le droit au logement opposable
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