Point de vue sur le surendettement

A l’heure où la réforme du crédit à la consommation proposée par Mme Lagarde, amendée par le Sénat, va bientôt être examinée à l’Assemblée Nationale, et où le nombre de dépôt de dossiers de surendettement se multiplie, le Président de la Fédération Crésus, souvent citée au fil des articles sur le surendettement, et qui représente un indéniable soutien pour les surendettés, a donné une interview à Paris Match le 13 Octobre dernier.

Jean-Louis Kiehl tient dans cet entretien des propos qui m’ont quelque peu étonnée, que je commente au fur et à mesure, et dont j’espère qu’ils pourront également recueillir quelques réactions.

Je cite in extenso l’article : Surendettement. Comment y échapper ?

Avec la crise, de plus en plus de familles se voient contraintes de déposer un dossier de surendettement. Une procédure douloureuse que l’on doit pouvoir éviter. Les conseils de Jean-Louis Kiehl (Fédération Cresus).
Avec la crise qui agit comme un révélateur, d’une situation elle-même tendue, voire sur le fil du rasoir…

Paris Match. Y a-t-il beaucoup de personnes surendettées ?
Jean-Louis Kiehl.
Avec la hausse du chômage, de plus en plus de ménages qui ont des revenus moyens, entre 2 000 et 3 000 € par mois, sont en train de sombrer dans un endettement excessif. Toutes les générations sont touchées : les grands-parents prennent des crédits pour aider leurs petits-enfants affectés par le chômage, ou se portent caution, et à leur tour connaissent de graves difficultés. Nous estimons que le pire est à venir : d’ici à 2011, deux millions de familles ­seront surendettées, soit six millions de personnes en tout.

Dont acte, et je crains que le chiffre soit sous-évalué : 10% de la population française.
Quand on sait la précarisation que représente cette situation, il y a de quoi s’inquiéter.
Sans compter les « faibles revenus » qui ne vont avoir d’autre choix que de s’endetter, ou d’augmenter leur dette…

Que peut-on faire pour l’éviter ?
Commencez par établir un budget : d’un côté les recettes (revenus, allocations, pensions…), de l’autre les dépenses (loyer, charges fixes, assurances…). La différence entre les deux représente votre capacité de remboursement. Si vos mensualités dépassent ce montant, il y a urgence. Allez vite voir votre banquier, demandez-lui de réaménager vos échéances, en les étalant sur une durée plus longue, et de convertir vos crédits revolving (au taux de 15 % en moyenne) en un prêt personnel (autour de 5 %).

Je serais curieuse de savoir combien de personnes surendettées, ou proches de l’être, ont pu obtenir gain de cause pazr le biais de telles négociations…

Et s’il ne veut rien entendre ?
Vous pouvez demander au juge d’instance un délai de grâce de deux ans. Il peut suspendre les remboursements ou réduire les intérêts des prêts. Pensez-y aussi si vous avez un prêt-relais qui ­approche de la date fatidique des deux ans. C’est une démarche qui ne coûte rien, mais il faut s’y prendre tôt.

A partir de quel moment faut-il se considérer comme surendetté ?
Dès que vous avez deux impayés. Vous êtes alors inscrit au FICP (Fichier national des incidents de remboursement des crédits aux particuliers) et on ne peut plus trouver de prêteur pour réaménager vos dettes.

Curieuse définition du surendettement, Mr Kiehl !
Et, me semble-t-il, drôle de confusion.
On peut avoir des incidents de paiement sans pour autant être surendettés.
Et être surendetté sans encore avoir eu d’incident de paiement !

Au pire, il reste la commission de surendettement ?
C’est une machine à broyer. Les ­ménages sont voués à la misère pour une décennie et ne s’en relèvent pas.

Euh…
La Commission de Surendettement permet de rembourser ses dettes en ré-échelonnant les remboursements, et généralement en revoyant les taux d’intérêts à la baisse, voire en éliminant ceux-ci.
Une machine à broyer ?
Par ailleurs, si les ménages sont voués à la misère (l’expression me semble exagérée !), il n’est pas certain que ce soit à cause de la Commission, si ?

Comment ça se passe ?
Vous allez chercher un dossier à la Banque de France, compliqué à remplir, puis vous attendez pendant des mois le plan d’apurement de vos dettes. Pendant ce temps, les huissiers continuent de vous harceler. Ensuite, on vous fait tout vendre et on vous laisse moins de 500 € par mois pour vivre. Une somme fixe qui, pendant dix ans, ne sera jamais revalorisée ! Pour qu’elle suive au moins le coût de la vie, il faudra déposer un nouveau dossier dans deux ou trois ans.

Forcément, dans une interview, il est impossible de rentrer dans les détails et les nuances.
Etait-il pour autant besoin de faire une telle caricature ?
Ceux à qui on laisse moins de 500 € par mois pour vivre, devaient auparavant ne même pas disposer de cette somme.
Et heureusement que tous n’en sont pas réduits à tout vendre et à disposer de moins de 500 € par mois…

Que conseillez-vous ?
Faites vos comptes. Résistez aux ­sirènes de la consommation. Etablissez une liste avant d’aller au supermarché. Rationalisez vos dépenses de téléphonie. Astreignez-vous à épargner ne serait-ce que 10 € par mois, sur un livret A. Si vous avez besoin d’un crédit, choisissez-le vous-même, au lieu de le subir. Même si vous êtes pauvre, mettez les banques en concurrence : certaines sont moins chères. Si l’étau se referme, ne faites pas l’autruche. Bougez-vous. Allez voir le banquier, le juge, faites-vous aider par une association comme la nôtre qui vous renseigne gratuitement. Surtout, ne tardez pas.

Mettre les banques en concurrence ? J’imagine que ça doit être plus facile pour certains que pour d’autres !

Association de défense des consommateurs : Fédération Crésus (Chambre REgionale du SUrendettement Social) .
Tél.: 03 90 22 11 34. 
Radio Crésus (dont il est question dans ce billet : Radio Crésus et autres actus du crédit à la consommation)

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